Qu’est-ce qui a le goût et la couleur de la Françafrique mais qui n’est pas la Françafrique ? Le Canadafrique, tabernacle ! En vingt ans, le bizness canadien s’est solidement implanté sur le continent noir en s’inspirant des méthodes qui ont fait la gloire de la France et la fortune de ses entreprises. Corruption, mercenariat, pillage, soutien aux dictatures : c’est la routine du secteur minier dominé par le Canada. En 1996, le gouvernement tanzanien vend à Sutton Ressources, une société canadienne, une zone aurifère, après avoir karcherisé les gueux qui l’exploitaient artisanalement. Les mineurs sont déportés en famille par dizaines de milliers. Une cinquantaine sont enterrés vivants dans des puits. En 2004, une autre, Anvil Mining Ltd, fournit gentiment à l’armée de Kabila son soutien logistique pour liquider une rébellion au Katanga, riche en cuivre et en cobalt. L’opération fait une centaine de morts parmi les civils. Dans le secteur pétrolier, les compagnies à la feuille d’érable suivent l’exemple d’Elf. Fondée par le sulfureux Tony Buckingham, ancien commando de sa majesté the Queen, Heritage Oil mérite la mention bien. Au début des années 1990, elle a participé à la guerre civile angolaise aux côtés du gouvernement, en échange de juteux contrats d’exploitation. Une décennie plus tard, elle remettait ça en République Démocratique du Congo, selon le même schéma : les cadavres sont africains, les dollars canadiens. L’oeuvre civilisatrice de l’Occident en Afrique a encore de beaux jours devant elle.
Article publié dans CQFD n° 39, novembre 2006.